3° Incontro "Arte Rupestre Alpina" Pinerolo 17,18,19 Ottobre 2003

Marques solsticiales

Léo Dubal, PhD
dubal@archaeometry.org


Résumé

L’axe de symétrie de certaines gravures rupestres du Nord de l’Italie
et du Sud de la France est dirigé vers le soleil levant solsticial. 
                                                                                                                       
Le point de rebroussement du soleil dans sa course a du servir de
marquage du jour "J"
du nouveau calendrier solaire.  


Pour décrire les marques solsticiales, trois mots clés s'imposent :
      axe
de symétrie  et  alignement sur l’ombre au lever (ou coucher) solsticial du  fil à plomb

Les marques solsticiales présentées ici sont de trois types, de niveau d’abstraction croissant :
Monuments / Anthropomorphes gravés / Signes abstraits gravés.

Pour les monuments, tel que Newgrange, 
c’est comme s’il importait de mettre en boîte le feu solaire naissant, 
là où sa course
(vers le Sud) a son point de rebroussement, de lui faire un cadre.
 
Le point de rebroussement du soleil dans sa course a du servir de marquage 
du « Jour   J » du nouveau calendrier solaire.

         


Dans la fenêtre au dessus de l'entrée de Newgrange, le soleil levant apparaît d'abord à gauche, le 17 décembre,
 puis, en ralentissant sa course vers le Sud, vers la droite, le 18, le 19, et le 20, 
et finalement le 21 au point extrême (aujourd'hui au centre de la fenêtre,
 mais... vers le bord droit de la fenêtre, il y a 5'200 ans), puis dès le 22,
 retour vers le Nord, vers la gauche, pour disparaître 4 jours plus tard.
En d’autre termes, c’est comme si -
pour s’approprier le cycle solaire - il importait de délimiter l’espace
de la course du soleil lorsqu’il pointe à l’horizon, la semaine du 21 décembre.

Pour marquer le début de l’année solaire, il faut un jour J.
Les 20 mètres de longueur du viseur solsticial de Newgrange mettent en évidence l’importance de cette appropriation.
Un privilège de Newgrange est l’absence de nouvelles constructions :
 dans l'encadrement de l'entrée, le scintillement de la rivière Boyne reste visible, alors qu'à Malte, par exemple,
depuis 80 ans déjà, des constructions empêchent le soleil solsticial de pénétrer dans l’hypogée d’HalSal

A Zürich on a encore la chance, d’admirer l’alignement de la Cathédrale avec le soleil solsticial,
mais, hélas, seulement depuis l’extérieur. 
à
cause des bâtiments actuels, il faut se placer du côté opposé à l’entrée de la Cathédrale, 
c’est-à-dire d’observer l’alignement sur le même axe, mais à l’envers, 
avec le soleil couchant du solstice d’été :
l’axe au coucher du soleil le 21 juin (Tramonto solstizio estivo) 
est le même que
l’axe au lever du soleil le 21 décembre (Alba soltizio invernale) 

     


Notons que l’analyse de l’orientation de cette construction révèle la perte du sens original de viseur solsticial. 
Le temple celtique original a l’orientation solsticiale de référence de l’époque, c’est à dire Stonehenge, 
ce qui n’est donc pas exact pour Zürich...
  
Charlemagne, lui, a fait construire sa Basilique en conservant cette orientation

m
ais au XII, l’intervention d’un architecte milanais change l’angle de 4° pour être en accord avec le modèle 
- la Cathédrale de Milan - dont l’axe est aligné avec la référence de l’époque qui est 
la Basilique de Galgano, près de Sienna.


Après l’alignement des monuments, passons à celui des gravures d’anthropomorphes.
Au solstice d’hiver, à La Gardette, 
l’ombre du fil à Plomb au soleil levant le 21 décembre est alignée avec l’axe de symétrie des gravures. 

 

Comme la lumière vient du bas, 
- pour des raisons de physiologie de l’œil -
 
l’ombre donne l’impression non pas d’une gravure concave, mais d’un bas relief convexe.  

 La différence est frappante avec la photo de cette gravure prise en été (la gravure est à droite au milieu).

 

 

 

Suit une vue du site prise le 21 décembre, avec deux des gravures remplies de neige, et le détail de la plus basse des deux.


Le prochain site,  la Peira Eicrita, est proche de Pinerolo, et a été étudié par Dario Seglie

 

L’axe d’une gravure très singulière est aligné avec l’ombre des arbres.

  Remarquons que les axes des autres gravures ne sont pas alignés.
Ce détail est probablement de nature chronologique.

Pour les sites de La Gardette et de la Peira Eicrita, examinons maintenant l’éclairage solticial. 
Comme à Newgrange, le point de rebroussement du soleil est cadré, mais ici par les crêtes voisines
de L
a Loubière et La Comba Fossate.   

 


Le graphique montre la montée du soleil le long de ces deux crêtes. 

 

 L’intervalle entre deux points est de 10 minutes. 

Le solstice d’été fait aussi l’objet de marques anthropomorphes. 
Ici en Suisse, à Grimentz, deux paires de pieds gravées indiquaient la position à prendre par l’observateur
 pour admirer le soleil solsticial
 

   

L’orientation de la seconde paire de pieds n’est pas correcte. 

Ce morceau de dalle s’est détaché du bloc original est a été déplacé par la glace.  

Cet exemple montre la difficulté de ce type d’observation si l’on ne dispose que d’une gravure !...
Ce problème se pose au Mont Bégo, l’original de la gravure du Chef de tribu ayant été placé au Musée de Tende,
 et des inondations ayant modifié le terrain.


 En supposant que la copie ait été positionnée correctement lors des observations, 
Chantal Wolkiewiez a remarqué, un 21 juin, que l’axe de symétrie de la gravure
 
était alignée sur le soleil levant tardif derrière le Bégo.

Notons que l’utilisation d’un même graphème à 5 reprises dans cette gravure révèle un niveau d’abstraction avancé.

Toujours au solstice d’été, voici le soleil levant sur Dos Sulif, 
au Valcamonica, à 500 m à vol d'oiseau du site bien connu del Capitelo dei due pini.


A droite sur la photo, Battista Mafessoli,  mon guide camunien depuis 1966,
soit depuis 37 ans…


 Sur la photo numérique, la peinture virtuelle permet de mieux distinguer 
le tracé des deux roses et d'indiquer le Nord.


L’ombre de la végétation tend a se confondre avec l’ombre du fil à plomb
Nous sommes tout de même parvenu à  photographier l’alignement de
 trois sur sept
des roses de Dos Sulif.

 

Si les marques solsticiales permettent de dépasser la pensée magique matriarcale, 
on peut se poser la question  
 "Etait-ce inévitable ?"La réponse me semble être oui... 
car, d’après le neuro-chirurgien Leonard Shlain,
les deux modes de perception du cerveau humain
 reflètent le mode de fonctionnement propre à chaque hémisphère. 


L'hémisphère droit
permet essentiellement la perception de l'espace (All-at-once),

la perception tout d’un coup, sans rapport de temps, c’est-à-dire la pensée magique


L'hémisphère gauche
permet au contraire la perception d’une séquence (One-at-a-time), 
du pas à pas, donc la perception du langage et des chiffres, c’est-à-dire la pensée causale.

 

Ce pourrait donc être la pratique du langage qui aurait permis l’appropriation du temps...

Les marques solsticiales hivernales seraient les plus anciennes et les estivales les plus récentes 
suivant un niveau d’abstraction croissant : monuments, signes anthropomorphiques, signes abstraits.


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